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Simandou 2040 – La bombe minière qui menace l’industrie américaine et fragilise l’équilibre mondial

« Le fer de Simandou n’est plus une richesse : c’est une mèche allumée dans la poudrière de la rivalité sino-américaine. »

À l’ombre des montagnes guinéennes, le gisement de Simandou dépasse désormais sa dimension économique pour devenir une poudrière géopolitique. L’un des plus vastes gisements de fer inexploités au monde concentre toutes les inquiétudes d’un système international fracturé par la rivalité sino-américaine. En offrant l’exclusivité de facto à Pékin, via Winning, Rio Tinto et des intermédiaires français, le régime de Mamadi Doumbouya a placé la Guinée au cœur d’une confrontation qui dépasse ses frontières.

Car contrôler Simandou, c’est contrôler l’acier de demain. Dans un monde où les routes maritimes stratégiques de l’Atlantique à Suez, jusqu’au détroit de Malacca sont sous tension, chaque cargaison de minerai devient un enjeu militaire autant qu’économique. L’acier guinéen est l’ossature des navires, des blindés et des réseaux ferroviaires dont l’OTAN et ses alliés dépendent pour maintenir leur supériorité face à Pékin. Pour nombre de stratèges occidentaux, le corridor Conakry-Asie ressemble désormais à un « couteau dans le dos de l’Alliance ».

Mais derrière ce jeu de puissance se cache une faille plus explosive encore : la fragilité juridique des contrats. Tous ont été signés par un pouvoir putschiste, sans légitimité constitutionnelle. En droit international, cette illégalité originelle est une brèche. Demain, un gouvernement élu pourrait invoquer le vice de consentement ou la corruption pour les annuler. Les précédents abondent : l’arbitrage Getma annulé par la CCJA à propos du port de Conakry, le dossier Simandou-BSGR fragilisé par la corruption, ou encore la sentence P&ID de dix milliards de dollars annulée à Londres pour fraude. Ces exemples rappellent que dans le droit des investissements, la stabilité contractuelle est une fiction lorsque les fondations sont viciées.

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Les partenaires chinois et anglo-australiens croient s’abriter derrière des clauses de stabilisation. En réalité, ils marchent sur un champ de mines : une alternance démocratique pourrait suffire à faire exploser ces accords et déclencher une avalanche de contentieux devant le CIRDI, la CCI ou la CCJA. Or même une sentence favorable n’est jamais sûre d’être exécutée, tant l’ordre public et la lutte anticorruption offrent des armes de défense aux États.

« À Simandou, on n’extrait pas du fer : on forge des chaînes de dépendance, prêtes à se briser dans les tribunaux de demain. »

Ce qui devait être un levier de développement est en train de se muer en piège stratégique. La Guinée se retrouve enfermée dans un duel asymétrique entre Washington et Pékin, grevant sa crédibilité et sa prime de risque. Loin de rassurer, ces accords accroissent l’instabilité, car chacun sait qu’ils peuvent être balayés d’un revers démocratique. À l’horizon 2040, le minerai censé bâtir des ponts pourrait bien n’être qu’une ancre litigieuse, traînée de tribunal en tribunal, symbole d’une souveraineté sacrifiée.

Simandou n’est pas une mine : c’est une bombe à retardement dont l’explosion se jouera autant dans les salles d’audience des tribunaux internationaux que dans les corridors stratégiques de l’OTAN et de Pékin.

Par Siba Beavogui 

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