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Ousmane Doumbouya : le visage masqué de la prédation d’État

« Dans les coulisses du pouvoir, le silence n’est pas toujours synonyme de sagesse. Il est parfois le bruit assourdissant des caisses qui se vident. »

Pendant que certains louent sa discrétion comme un gage de loyauté républicaine, Ousmane Doumbouya, conseiller spécial du président Mamadi Doumbouya, tisse dans l’ombre une toile d’intérêts privés, d’influence minière et de fortune accumulée à un rythme aussi vertigineux qu’inquiétant. En moins de quatre ans, cet homme jadis discret est devenu le cerveau opérationnel d’un réseau opaque, où se croisent pouvoir, argent et silence d’État.

De la plume au coffre-fort

Sous des dehors de stratège de la Présidence, Ousmane Doumbouya s’impose aujourd’hui comme l’un des hommes les plus puissants, mais aussi les plus énigmatiques, de la transition guinéenne. Il ne parle pas souvent, dit-on, mais ses actes, eux, crient plus fort que toutes les proclamations. Plusieurs sources concordantes affirment qu’il serait à la manœuvre dans la captation de fonds publics, notamment issus du contenu local dans le secteur minier, détournés vers des circuits financiers opaques.

Le mystère des 20 millions

Les documents confidentiels consultés par notre rédaction pointent une série de mouvements financiers inexpliqués, pour un montant total dépassant les 20 millions de dollars US. Ces fonds transiteraient par un réseau de sociétés écrans basées à Dubaï, Abidjan et Conakry, avant d’être injectés dans des actifs de luxe : résidences, véhicules haut de gamme, investissements transfrontaliers.

Plusieurs de ces entités seraient liées à des proches collaborateurs, dont Bouna Sylla, autre personnage-clé du dispositif minier gouvernemental. Ensemble, ils auraient bâti un empire parallèle dans le dos de l’État, tout en verrouillant les circuits d’accès aux marchés publics.

Empire du luxe, austérité nationale

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Dans un pays où l’indice de pauvreté reste alarmant, le train de vie de M. Doumbouya suscite l’indignation grandissante. Châteaux en Côte d’Ivoire, villas sécurisées à Lambanyi, Kamsar, Abidjan, Dubaï, flottes de véhicules premium, tous ces signes extérieurs de richesse contrastent violemment avec le discours d’austérité porté par la Transition.

L’homme serait même protégé par des relais dans l’armée et la gendarmerie, notamment via le Général Balla Samoura, selon plusieurs sources sécuritaires, qui y voient un plan de repli en cas de rupture institutionnelle.

L’État dévoyé par son propre silence

Le plus alarmant dans cette affaire n’est pas seulement l’ampleur des montants ou la sophistication des montages. C’est l’impunité avec laquelle cette mécanique fonctionne, malgré les signaux d’alerte internes. La CRIEF, censée être le bras judiciaire de la moralisation, semble étrangement silencieuse sur ce dossier.

Pire : au lieu d’un audit, c’est une opération de communication qui se déploie pour glorifier l’homme, le faire passer pour une conscience républicaine. Une rhétorique creuse, qui ne trompe plus une jeunesse guinéenne de plus en plus informée, et de plus en plus frustrée.

Guinée : à la croisée des chemins

Le cas Ousmane Doumbouya n’est pas seulement celui d’un homme. Il est le symbole d’un système : celui qui transforme les serviteurs de l’État en prédateurs d’élite. Celui qui recycle la discrétion en camouflage. Celui qui fait de la loyauté une rente personnelle.

La Guinée mérite mieux. Elle mérite des serviteurs, pas des actionnaires de l’État. Des bâtisseurs, pas des pillards habillés en patriotes. Le moment est venu d’ouvrir les yeux, de poser les vraies questions, et d’exiger des réponses. Sans quoi, le silence de ce conseiller spécial deviendra, pour tous, un désastre national durable.

Par Siba Béavogui

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