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Eau Potable à Conakry : l’État vend des mirages à 500 millions d’euros

Le 19 avril 2025, le gouvernement guinéen annonçait en grande pompe un “financement historique” de 500 millions d’euros pour la phase 2 du Schéma Directeur d’Alimentation en Eau Potable (AEP) du Grand Conakry. Une annonce reprise en boucle par la presse d’État, présentée comme une victoire diplomatique et un tournant structurel. Mais à y regarder de plus près, ce projet n’est qu’un château d’eau… en papier.

Une promesse n’est pas un projet

Le premier mensonge de cette communication officielle, c’est de confondre mobilisation financière et disponibilité réelle des fonds.

Oui, des lettres d’intention ont circulé.
Oui, des institutions comme Euler Hermes ou Deutsche Bank ont été citées.

Mais aucun contrat de prêt signé, aucun décaissement bancaire, aucune preuve comptable ne vient confirmer l’existence de ces fonds sur un compte guinéen.

Le gouvernement évoque un “montage structuré par Euler Hermes”, comme si cela suffisait à transformer une promesse en réalité budgétaire. Or, Euler Hermes est un assureur export, non un bailleur. Sa participation dépend d’un enchaînement complexe de conditions préalables, notamment une contractualisation entre KEC International (présumé maître d’œuvre) et la République de Guinée, suivie de garanties souveraines acceptées par la banque. Rien de tout cela n’est documenté à ce jour.

930 millions de dollars mobilisés… mais où sont les chantiers ?

Depuis 2022, le régime Doumbouya a multiplié les annonces sur l’eau. Banque mondiale, BEI, Deutsche Bank… un cocktail d’acteurs cités pour gonfler artificiellement un bilan sans résultats. Si les fonds sont réels, pourquoi les habitants de Conakry vivent-ils toujours au rythme des coupures ?
• Aucun doublement de la capacité de production n’a été observé.
• Aucune mise en service de station moderne depuis trois ans.
• Aucun appel d’offres public pour la phase 2 n’est accessible.

La réalité est plus crue : les milliards évoqués ne servent qu’à alimenter la propagande, pendant que la ville de Conakry s’enfonce dans une crise hydraulique structurelle.

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La mythomanie du régime : gouverner par l’illusion

Depuis son arrivée au pouvoir, Mamadi Doumbouya gouverne par le verbe, non par les actes. Il ne construit pas ; il annonce. Il ne planifie pas ; il met en scène. Il ne rend pas compte ; il s’autocélèbre.

C’est la stratégie du “général des mirages” :
• Des routes invisibles, inaugurées sans asphalte.
• Des usines virtuelles, visitées sans production.
• Et maintenant, une eau potable à 500 millions d’euros, sans un seul litre de plus au robinet.

Ce gouvernement instrumentalise les outils de la diplomatie financière, sans comprendre que dans les milieux internationaux, ce sont les preuves de décaissement qui font foi, pas les communiqués de presse.

Le peuple a besoin d’eau, pas d’effets d’annonce

Tant que les puits s’assèchent, tant que les enfants marchent des kilomètres pour une bassine, tant que les femmes perdent leur journée à remplir un bidon, aucune cérémonie officielle ne pourra camoufler l’échec.

L’accès à l’eau ne se résout pas par décret, mais par une gouvernance transparente, des investissements réels, et une planification rigoureuse. À Conakry, la junte n’a offert qu’un mirage coûteux, dans un désert de responsabilité.

À la communauté internationale : exigez des preuves.

Au peuple de Guinée : exigez l’eau.
À la junte : cessez de nous faire boire des illusions.

Par Siba Beavogui – Journaliste et analyste

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