Depuis le 21 mai 2024, une nouvelle date noire marquant un sombre tournant depuis l’avènement du CNRD, les licences de plusieurs médias guinéens ont été arbitrairement retirées par une décision aussi incompréhensible qu’illégale, signée par le ministre M. Fana Soumah sous l’ère de M. Amadou Oury BAH, premier ministre, Chef du gouvernement.
Qui l’eut cru ? Cette mesure intervient après plusieurs mois de brouillage de ces mêmes médias, illustrant une attaque liberticide et flagrante contre la liberté de la presse, un pilier essentiel de toute démocratie, la nôtre arrachée de haute lutte dans notre pays.
Pour ceux qui en doutaient encore, cet acte démontre de manière éclatante la volonté du CNRD et de son gouvernement de museler toutes les voix dissonantes et divergentes dans le but de s’accrocher indéfiniment au pouvoir.
Pendant ce temps, les médias, bénéficiant temporairement de l’autorisation d’exercer, restent passifs et n’entreprennent aucune action de solidarité envers leurs confrères victimes de cet abus de pouvoir. Des actions de soutien auraient pu par exemple inclure 72 heures sans presse, un boycott des couvertures médiatiques des activités gouvernementales. Mais non, c’est l’immobilisme total.
Le silence complice de ces hommes du micro et de la plume est honteux. Ils profitent de l’absence des mastodontes médiatiques pour se faire une place, tandis que les rumeurs circulent sur leurs liens avec le palais ou sur leur séduction par les dignitaires du moment. Pour eux, les médias guinéens ne se résument pas aux trois interdits d’exercer, déclare un autre patron de presse, dans une tentative pathétique de minimiser la gravité de la situation. Naturellement, le malheur des uns faisant le bonheur des autres.
La posture actuelle de ces médias est scandaleuse. Le problème fondamental de la presse guinéenne réside dans le manque de sincérité et de solidarité parmi ses acteurs, une tare commune à d’autres secteurs corporatistes du pays.
Souvenons-nous de la restriction illégale des sites Guineematin et Inquisiteur. À l’époque, leur audience était la seule source de soutien. Ce qui signifiait qu’aux yeux de la corporation, ces sites et leurs administrateurs ne méritaient pas une mobilisation collective. Les communiqués de condamnation étaient laconiques et sans impact. Les actions de protection du syndicat des professionnels de la presse privée ont manqué du soutien nécessaire. M. Sékou Jamal Pendessa, le leader de ce SPPG a payé le prix de l’abandon de ses pairs et de son entêtement face à la junte. La suite est connue de tous : une tragédie évitable.
Le site Mosaiqueguinee a été restreint, les installations de Sabari FM ont été démantelées, et le groupe Djoma Média a été saboté et martyrisé pendant de longs mois. Tous ont été abandonnés à leur sort par leurs confrères. Les exemples de lâcheté entre médias guinéens foisonnent, abondent et illustrent parfaitement cette inaction honteuse de la presse.
On ne sent le poids de l’injustice que lorsqu’on la subit soi-même. Face à l’épreuve terrible que traversent les médias guinéens, il est urgent d’appeler à des actions collectives et énergiques pour briser l’élan autocratique et arrogant de cette junte aux abois.
Pour y parvenir, les acteurs des médias guinéens doivent faire preuve d’une solidarité sincère et se relever ensemble pour exister. Leurs démarches ne doivent pas se limiter à des communiqués de résignation, mais inclure des initiatives courageuses, loin des actions solitaires menées par certains journalistes sur X, TikTok et Facebook.
Les journalistes, patrons de médias et leurs syndicats doivent organiser des veillées ou des nuits blanches dans les sièges des médias, des marches et des sit-in de protestation, et signer des tribunes collectives pour exprimer leur opposition à tout glissement de l’agenda de la transition prévu pour fin 2024. Parce que c’est de cette transition qu’ils subissent tous les malheurs du monde. Ils doivent également recourir à la voie judiciaire et s’allier aux forces vives de Guinée pour mener ensemble la lutte pour la libération.
La liste des actions de protestation contre cette décision illégale et illégitime est longue. Le salut passe inéluctablement par une volonté sincère et une authentique détermination des différentes composantes de la nation pour se sauver, sinon elles périront, tristement. Agissons.
Ibrahima Diallo( Ibou Diallo du MoDeL)
Auditeur en Communication Publique & Politique