Terrorisme d’État – Un journaliste traqué par le chien de garde de la dictature Fadi Wazni : entre surveillance numérique et intimidation juridique »
West Chester (USA), août 2025. Le quotidien de Siba Béavogui, journaliste d’investigation connu pour ses enquêtes sur la corruption et les crimes économiques en Guinée, a basculé dans un climat d’insécurité technologique et juridique.
À quelques jours d’intervalle, il a été confronté à deux formes d’intimidation : un traçage électronique illégal via un AirTag Apple et une mise en demeure juridique exigeant la censure de ses publications.
Un AirTag dissimulé, 10 heures de traque continue
Le 4 août, son iPhone l’alerte : un dispositif AirTag inconnu le suit de manière persistante. Pendant près de dix heures, de 8h25 à 18h24, son téléphone enregistre des points rouges successifs reliés par des lignes sur l’application Localiser. Une cartographie précise de ses déplacements apparaît, typique d’un suivi intentionnel.

L’analyse technique est sans équivoque : « Densité élevée, traçage constant, suivi actif en mouvement ». Plus troublant encore, lorsque le journaliste isole son second iPhone, le signal cesse aussitôt. Conclusion : l’AirTag avait été dissimulé dans ou sur son propre appareil personnel, transformé en relais de surveillance.
Une adresse privée divulguée dans un courrier d’avocat
Trois jours plus tôt, le 1er août, un cabinet d’avocats basé à Washington, Meier Watkins Phillips Pusch LLP, lui adressait une mise en demeure. Dans ce courrier, il était sommé de retirer des articles publiés sur GuineeFutur.info à propos de l’homme d’affaires Fadi Wazni, et d’abandonner toute future publication à son sujet.
Mais au-delà de l’injonction, un détail fait bondir : le document contient la divulgation non autorisée de l’adresse personnelle du journaliste. Dans son courrier de réponse, Béavogui dénonce un « acte de harcèlement transnational à des fins de censure » et une « mise en danger directe et prévisible ».
La jonction des menaces : numérique et juridique


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La chronologie interpelle. Le suivi par AirTag intervient juste après la réception de la lettre contenant son adresse privée. « Je vous rends responsable de toute atteinte à ma sécurité », écrit-il dans une mise en cause adressée à l’avocat de Fadi Wazni.

Pour le journaliste, il ne s’agit pas de coïncidences. Il pointe une stratégie d’intimidation combinant pression judiciaire et surveillance électronique. Les deux méthodes convergent vers un même objectif : le contraindre au silence.
La réponse ferme d’un journaliste
Dans sa notification officielle, envoyée aux avocats et aux instances professionnelles, Siba Béavogui exige :
1. L’origine exacte de l’adresse utilisée dans le courrier d’avocat.
2. Un engagement écrit à ne plus diffuser cette donnée à aucun tiers.
3. La fin de toute intimidation à son encontre et à celle de ses collaborateurs .
Il annonce également être prêt à saisir le District of Columbia Bar Association, à porter plainte aux États-Unis, et à alerter les ONG de défense de la presse comme le CPJ (Committee to Protect Journalists) et RSF (Reporters Sans Frontières).
Un cas emblématique des nouvelles menaces
Cette affaire illustre la vulnérabilité des journalistes à l’ère numérique. Dans les régimes où la critique est dangereuse, les moyens d’intimidation évoluent : traçage électronique, harcèlement juridique, exposition de données privées.
« Je suis déterminé à défendre mon droit de dire la vérité et à vivre sans menace », conclut Béavogui dans sa notification. Pour lui, cette double offensive est un signal alarmant sur la manière dont la technologie et le droit peuvent être instrumentalisés pour fragiliser la liberté de la presse.
À West Chester, les points rouges ont cessé de clignoter sur l’écran. Mais l’onde de choc, elle, ne fait que commencer.
Par Siba Beavogui, journaliste d’investigation