45 000 agents contre un seul homme : ce n’est plus la sécurisation, c’est une déclaration de guerre de survie
Quarante-cinq mille agents, plus de 1 000 engins blindés, hélicoptères d’attaque et vedettes rapides mobilisés contre un seul homme Verni Pivi. Appeler cela la « sécurisation du référendum » relève du déni c’est une déclaration de guerre de survie.
Un aveu et un pari dangereux
Militariser un processus politique massif, ce n’est pas prouver la force c’est reconnaître la faiblesse. Si l’adhésion populaire au projet existait, il n’aurait pas besoin d’être imposé sous blindés. La décision de transformer le pays en zone militaire révèle la peur d’un pouvoir isolé peur qui peut, au lieu de garantir la stabilité, se retourner en catalyseur d’effondrement, si la résistance conserve sa cohésion.
La cérémonie d’inauguration du Poste de Commandement Opérationnel de Sécurité Intérieure et l’annonce d’un déploiement massif 45 000 agents, plus de 1 000 engins blindés, hélicoptères d’attaque et embarcations rapides transforment le rendez-vous électoral en une opération de guerre intérieure. Ce n’est pas un détail technique c’est une vision du pouvoir.
Quand on prépare un scrutin comme une opération militaire, on dit au peuple deux choses : le régime ne croit plus à la légitimité populaire, et toute dissidence sera traitée comme une insurrection. Les urnes deviennent décor ; la vraie scène se trouve désormais dans les postes de commandement, les plans de déploiement et les règles d’engagement.
Une stratégie déphasée face à la guerre asymétrique

Les « commandos invisibles » que la junte prétend viser ne sont pas des forces conventionnelles.
Ils opèrent selon la logique de la guerre asymétrique mobilité, dispersion, connaissance intime du terrain, appui local. Multiplier blindés et colonnes motorisées n’éteint pas cette mobilité elle la provoque.
L’histoire militaire et la théorie stratégique montrent que l’ennemi léger se dissout devant la force lourde, qui, éparpillée et vulnérable surtout en milieu urbain et sur axes segmentés, perd son effet de masse et devient une proie aux embuscades et au harcèlement.

- Advertisement -
En publiant son plan d’attaque ou en rendant visible sa stratégie, la junte commet une faute tactique elle permet à ses adversaires de s’adapter dispersion, feintes, contremesures et donne à la résistance une légitimité morale renforcée. L’offensive annoncée peut ainsi se muer en propre piège pour l’offensive elle-même.
Le prix humain d’une option aérienne
L’emploi d’hélicoptères armés et de frappes en zones densément peuplées multiplie dramatiquement le risque de dommages collatéraux. Une frappe « ciblée » sur une cellule mobile exige un renseignement quasi parfait condition rarement réunie dans un théâtre intérieur où population et acteurs se mêlent. L’usage de la puissance aérienne dans un contexte urbain risque d’embraser des quartiers entiers, d’entraîner des victimes civiles et de radicaliser l’opinion. Les coûts politiques et humanitaires seraient immédiats et irréversibles.
Impact sur la crédibilité du scrutin
Ce déploiement portera un coup sévère à la crédibilité du référendum. L’abstention et la conformité peuvent signifier une capitulation silencieuse; la peur peut aussi provoquer l’action : foyers de résistance, affrontements urbains imprévisibles et lourds pour les civils.
Dans tous les cas, la démocratie en sortira traumatisée. Les partenaires internationaux, confrontés à un scrutin organisé sous un tel dispositif, auront peu d’alternatives crédibles condamner, sanctionner, ou reconnaître un résultat entaché de coercition aucun de ces choix n’est neutre.
Appel à la responsabilité civile et internationale
Ce déploiement n’est pas seulement une manœuvre tactique : c’est une responsabilité morale. Les acteurs civils — journalistes, ONG, partis politiques, diplomates — doivent agir avec détermination et responsabilité : documenter et archiver, protéger les témoins et les médias indépendants, décentraliser les formes de contestation pacifique, internationaliser l’alerte pour créer des coûts diplomatiques et économiques à la répression.
L’histoire jugera non seulement le résultat du 21 septembre, mais aussi ceux qui auront choisi la surenchère des armes plutôt que le débat.
La Guinée mérite une constitution née du dialogue, pas d’un état-major. Poser des blindés devant les urnes n’empêche pas le jugement des peuples ni celui de l’histoire. Quand la force remplace la légitimité, la fin du pouvoir s’approche parfois plus vite que ses maîtres ne l’imaginent.
Par Siba Beavogui