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Disparitions forcées en Guinée : Ousmane Sonko, l’aveu d’une complicité silencieuse

La récente déclaration d’Ousmane Sonko ne fait pas que trahir les valeurs des droits humains : elle jette une ombre inquiétante sur la sécurité de nos compatriotes guinéens exilés au Sénégal.

En refusant de dénoncer clairement les disparitions forcées en Guinée, le Premier ministre sénégalais normalise l’arbitraire et ouvre la voie à toutes les spéculations :
Les autorités sénégalaises pourraient-elles, demain, livrer des opposants guinéens en exil ?
Peut-on encore considérer le Sénégal comme une terre d’asile sûre pour les voix dissidentes ?

La réponse implicite de Sonko est glaçante :

“Ce n’est pas à moi de dire aux Guinéens ce qu’ils doivent faire.”

Mais alors, si Mamadi Doumbouya exigent l’extradition de militants réfugiés à Dakar, qui les protégera ?
Si des agents guinéens opèrent clandestinement au Sénégal, comme cela s’est déjà vu ailleurs, à quel niveau l’État sénégalais tirera-t-il la ligne rouge ?

Ce flou diplomatique, déguisé en respect des souverainetés, met directement en péril la sécurité des exilés politiques guinéens. Car quand un chef de gouvernement dit qu’il n’interviendra pas, il laisse la porte ouverte à ceux qui veulent faire taire.

Le silence, parfois, crie plus fort que les mots. Et lorsqu’un Premier ministre, jadis incarnation de la lutte pour la justice et la dignité, choisit l’ambiguïté face à l’injustice, il devient complice — sinon moralement, du moins politiquement.

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Interrogé sur les disparitions forcées de Foniké Mengué, Billo Bah et Habib Marouane Camara, tous portés disparus dans une Guinée militarisée, Ousmane Sonko a opté pour une posture de non-ingérence aseptisée, se retranchant derrière la sacro-sainte souveraineté étatique. Une réponse molle, froide, dénuée de cette ardeur qui avait autrefois galvanisé les foules sénégalaises contre l’autoritarisme.

“Ce n’est pas à moi de venir en Guinée pour dire ce que les Guinéens doivent faire.”
– Ousmane Sonko, Premier ministre du Sénégal

Mais alors, monsieur Sonko, qu’est devenue votre indignation légendaire contre les violations des droits de l’homme ? Celle qui vous a conduit en prison, qui a nourri votre discours, et qui a fait de vous un symbole pour la jeunesse africaine ? Faut-il comprendre que la morale politique s’applique à géométrie variable, selon les frontières, les intérêts ou les convenances diplomatiques ?

Car enfin, refuser de condamner clairement des actes aussi graves que des disparitions forcées, ce n’est pas faire preuve de prudence. C’est se réfugier dans une lâcheté diplomatique. C’est abandonner ceux qui, en Guinée comme au Sénégal, croient encore que la parole politique peut servir les peuples, non les pouvoirs en place.

Votre discours est une gifle à ceux qui luttent encore pour la justice. Une trahison à peine voilée. Vous n’avez pas seulement refusé de soutenir trois militants arbitrairement enlevés ; vous avez désavoué votre propre histoire.

Car marcher aux côtés des criminels, c’est s’enchaîner à leurs forfaitures. Et quand la peur ou l’ambition fait taire la vérité, elle transforme les héros d’hier en ombres décevantes.

Monsieur Sonko, l’Afrique n’a pas besoin de dirigeants frileux, mais de consciences courageuses. Vous aviez en main cette conscience. Vous l’avez posée sur l’autel du silence. L’histoire, elle, n’oubliera pas.

Par Siba Béavogui

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