Un superviseur de recensement s’évapore, emportant moto, tablette, téléphone, primes… Il a tiré sa révérence comme on quitte une mascarade : discrètement, sans remords. Et ce n’est pas un fait divers.
C’est un condensé du système CNRD : le règne du hasard, le sacre de l’improvisation, la gouvernance en roue libre.
Le recensement ? Un pilier de la transition, paraît-il. Mais à Koumbia, on recense surtout les disparitions : celle du matériel, celle de l’argent, et bientôt — ne nous étonnons pas — celle de la crédibilité.
Et l’ironie du sort est implacable : c’est à Koumbia, dans Gaoual, terre d’un certain porte-voix sans parole, ancien communicant de l’UFDG devenu ventriloque du CNRD, que le théâtre se joue. Là même où, probablement un cousin — et certainement membre du CERAG — a été recruté pour faire de la propagande
et calmer son mécontentement après plusieurs mois de coupe de bois sans salaire.
Première entreprise du “nouveau ministre”, répétiteur officiel des bêtises du CNRD.
Voilà ce que produit un État dirigé par des slogans et des uniformes : une administration faite de ficelles, d’intimidation et d’incompétence généralisée. On nomme à la va-vite, on supervise à la louche, on gère à l’instinct.
Et quand tout part en vrille, on publie un communiqué en sourdine, on lance un avis de recherche, et on retourne au Conseil des ministres comme si de rien n’était.
Car sous le vernis de l’ordre, le désordre est roi.
Et le CNRD est un grand jardin mal entretenu,
où chaque ministre est un apprenti-jardinier sans outils, et où les mauvaises herbes poussent plus vite que les projets.

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Ce régime ne gouverne pas, il bricole.
Il ne réforme pas, il rafistole.
Il ne dirige pas, il devine.
On promet une Constitution, on perd les tablettes. On annonce la rigueur, on recrute au piston. On rêve de souveraineté, on laisse des fonctionnaires fuir avec les maigres miettes du processus.
Le CNRD ne dirige pas une transition. Il orchestre un chaos en différé. Chaque jour offre son sketch, chaque région son scandale, chaque nomination son scandaleux curriculum.
Mais la troupe continue de jouer — et le général, lui, déclame. Les mots fusent, les injonctions pleuvent, mais au fond, le bateau prend l’eau… et le capitaine réclame encore des rameurs.
Alors qu’on ne nous parle plus de sérieux. Qu’on ne nous brandisse plus le recensement comme une opération sacrée, quand les fichiers se perdent, les agents s’enfuient et les données dorment dans des sacoches volées.
Ce régime a tout : le pouvoir, l’argent, les armes.
Tout sauf la compétence.
Tout sauf la vision.
Tout sauf l’humilité.
Le CNRD, ce n’est pas une transition. C’est une éclipse démocratique. Un grand théâtre où l’État se donne en spectacle — pendant que la République, elle, pleure en coulisses.
Alpha Issagha Diallo